Mission #1-bis ou Alpha : Recueillement d'informations

Au fin fond d’Azkaban, dans une pièce fermée, se trouvait une table circulaire, ou deux hommes se regardaient. L’un était vieux, le visage fatigué, le nez cassé de part en part, parsemé de cicatrices certainement infligées au combat. Les mains croisées, le menton appuyé sur ses deux pouces, il observait celui qui lui faisait face dans un silence gêné. C’était quelqu’un à l’apparence troublante. Vêtu d’une chemise blanche en soie, les manches retroussées au dessous du coude, une belle cravate jaune et rouge qui pendait de son col. Ses cheveux violets fendaient l’air en pics.

Le visage de cet homme était étrange, inhabituel ; c’était celui d’un clown. Non pas celui d’un de ces hurluberlus ayant pour but de nous faire rire, non… celui là effrayait, apeurait. Ses yeux n’étaient que deux petits points dans ses grandes pupilles, des yeux sans joie et pourtant ironique, moqueur, malicieux.
S’échappait de son regards de fines larmes d’encre faites de minces trais fins dessinés au pinceau, tout comme ceux qui monte vers ses sourcils, de la même couleur que le noir de ses lèvres. Les bras en croix, il scrute le regard de celui qui lui fait face.

Lorsque le vieil homme finit par détourner le regard, le plus jeune se mit à rire, d’un rire léger, enfantin. Seulement et faiblement éclairé par une lampe au dessus d’eux, il rapprocha son visage de la table, se mettant ainsi à la lumière. Le même sourire qui ne l’avait pas quitté depuis longtemps maintenant, il prit la parole.

- Toujours pas, donc ? demanda il.
- Non… toujours pas, tu m’en vois désolé.

Silence…

- Bien sûr, bien sûr… mais dis moi Maugrey, jusqu’où allons nous continuer ainsi ?
- Tu sais comme moi que tu as le plus de chance que cela se réalise durant les missions que si tu t’y lance seul.

Il y eu un long silence pesant. Sawyer s’accouda à sa chaise et recula sa tête, de façon à rejoindre l’ombre, son domaine de prédilection. Reprenant la parole, il prit une voix sardonique, aiguë.

- Pourquoi ai-je l’impression que tu me mens Maugrey ? Pourquoi ai je l’impression que tu essayes de m’utiliser le plus longtemps possible ?
- J’espérais que tu te lierais avec les autres, que tu t’attaches au groupe, mais tu refuses d’être sociale. J’ai besoin de toi ici, mais je continu à chercher, nous n’avons eu qu’une seule mission jusqu’à présent.
- Je me fiche éperdument d’être sociale ou pas ! Et pour la première fois depuis longtemps, le ton de sa voix n’était plus le même, plus dur, plus mature, l’atmosphère prenait ainsi un tournant électrique par son seul changement d’intonation. Il gardait cependant ce même sourire. Nous avons conclu un marché, respecte le tiens et je respecterais le miens.
- Tu crois que c’est si simple ?
- Qui a dit que ça l’était ? Prouve moi juste que tu fais ton possible. Sa voix était redevenu joyeuse. Et maintenant dis moi pourquoi tu m’as fais venir.

Maugrey, rassuré de savoir Sawyer encore dans son équipe, sortit un petit calepin.

- Mon plus important informateur va me fournir des documents confidentiels. Mais bien sûr, ma tête est trop connue pour que je me déplace librement, tu iras donc à ma place. Tu as rendez-vous à l’église de Hasting à la périphérie de Londres. J’espère que tu vois où c’est, sinon va en centre ville et demande. « Il » te dira quelque chose comme « le Phénix est déchu… », tu répondras par « …mais il renaîtra de ses cendres. » et tu pourra rentrer en contact avec lui. Pas de fantaisies, j’ai besoin de ce que peut te donner cet homme.

Sawyer acquiesça faisant ainsi signe qu’il avait compris. Un simple recueillement d’information en quelque sorte. Pourquoi Maugrey faisait il alors spécialement recours à lui ? Qu’avait donc cet informateur ?


- Surtout fait ce qu’il te dis.
- Je fais toujours ce que l’on me dit, hin hin hin… répondit il le sourire aux lèvres.

Il tourna sur lui même dans un habile ballet de claquettes afin de se retrouver devant la grande église. C’était un de ces grands monuments qui se ressemblaient tous. Doté d’une hautes cloches, de jolies vitraux représentant le Chris, et la porte ouverte, comme si elle l’invitait à rentrer.

Observant le ciel, le sourire malicieux, il fit la révérence avant de rentrer les bras ballants. C’était une grande église, remplie de bancs et de tables pour les fidèles. Sur les cotés les même vitraux que l’on pouvait voir à l’extérieur, mais plus intéressant encore, au fond de la grande salle, non loin de la grande croix, se trouvait un orgue.

Il était quinze heure cinquante deux, il avait rendez-vous à seize heure. S’approchant du grand instrument, il posa délicatement son majeur sur une touche, afin d’en faire ressortir une profonde note grave. Fermant les yeux, les lèvres de Sawyer s’étirèrent un peu plus, il posa l’index de sa main droite pour faire souffler des gros tubes une note plus aiguë. Sans plus y réfléchir, il posa tout les doigts de ses deux mains et se mit à jouer la Marche Funèbre, tout en riant fort, donnant à la scène un air infernal.

Lorsque quatre heure sonna au clocher, il put entendre entre deux notes le pas léger d’un homme derrière lui. Levant son coude il entreprit de le regarder de face, mais une voix l’interrompit. Elle était rude et contrôlée, comme si l’homme faisait tout pour ne pas être reconnu ;

- Ne vous retournez pas ! Bref… nous savons très bien que le Phénix est déchu.
- Ce n’est que pour mieux renaître de ses cendres monsieur l’informateur.
- Bien… je vais poser…


Mais avant qu’il puisse finir sa phrase, Sawyer se prit la tête entre les mains et la balançant de gauche à droite et se mit à crier ;

- Arrêtez de rentrer dans ma tête ! Raah, que je n’aime pas ça !

Sawyer ressentait une intrusion dans son esprit. Mais bien avant qu’il ne tente de l’en repousser, il sentait le légiliment perdu dans les méandres de ses pensées et souvenirs.
Tout y était mélangé, perdu, brouillé, certains avaient eu lieu, d’autre n’était que pure fantasme et imagination. L’homme s’égarait dans cette âme qui n’avait plus rien d’ordinaire, aucune logique n’érigeait le sorcier en face de lui, il possédait une protection de mentale unique, et il en devenait un problème insoluble.
Ainsi, perdu dans ce labyrinthe mental, il fut presque soulagé quand via l’occlumencie, Sawyer lui bloqua une à une les portes de ses souvenirs, le laissant devant un esprit étanche puis rejeté à jamais de cet enfer, ce vide béant, à la fois attractif et dissuasif.

Mais qui était donc cet homme.

Bienveillant ou malfaisant ?

Il n’arrivait pas à le cerner du peu qu’il avait pu saisir. De dos il ne pouvait voir que le violet de ses cheveux, il repensa un instant à une ancienne connaissance, puis secouant la tête pour se remettre les idées en place, il le fixa à nouveau, qui s’apprêtait à rejouer de l’orgue, l’air de rien.

- Vous avez compris la leçon, monsieur le curieux ?

L’homme derrière Sawyer était assez intelligent pour ne pas répondre aux provocations, mais au fond de lui même, il espérait à ne plus jamais avoir à re-rentrer dans cet esprit là.

- Je pose le dossier là. Ne vous retournez pas tant que je ne suis pas parti.

On put entendre le bruit sec du papier que l’on pose sur du bois, un bruit silencieux, puis, plus rien. Sawyer se retourna, et put voir que l’église était à nouveau vide. Il se leva, saisit ce qui semblait être un carnet plein de note faites au crayon et à la plume. Il transplanna gaiement à Azkaban, pour le donner à Maugrey. Se dernier s’empressant de remettre à jour la protection magique du lieu.